Description

Mais aussi avec bien d'autres moyens de transport parfois des plus surprenants... Le 1er juillet 2010, je pars de Bretagne à vélo. Arrivé au Maroc, je traverse l'océan Atlantique en voilier-stop. Je passe ensuite un an et demi en Amérique du sud. Puis d'avril 2012 à septembre 2013, je traverse l'océan Pacifique en voilier. Enfin, en mars 2014, je reprends le vélo pour rentrer en France depuis Bangkok, en suivant la route de la soie à travers la Chine et l'Asie Centrale...

mardi 17 juin 2014

Aux marches de Zhongguo

Nihao !
Les Chinois sont fans de la France. C'est ainsi que je passe le tropique du Cancer sous la Tour Eiffel !

Chine : Yunnan et Sichuan à vélo (lettre du 24 mai)
Le 20 avril, je rentre en Chine (Zhongguo de son vrai nom). Je passe la frontière en vélo sans problèmes (poste frontière de Botem). La Chine est juste fascinante. Immense, diverse, on devrait dire les Chines. Je suis maintenant dans le centre du pays, près du monastère tibétain de Labrang, dans la petite ville de Xiahe, qui est à 160 kilomètres au sud-ouest de Lanzhou. Depuis Bangkok, ma direction est pratiquement plein nord. En Chine, après avoir traversé le Yunnan et le Sichuan, j'ai atteins le Gansu. A partir de Vientiane, la capitale du Laos, mon itinéraire est plein de montagnes. Il franchit toutes les dépressions géographiques induites par les fleuves et les rivières qui descendent du plateau tibétain. Bénéficiant d'un visa de deux mois, je n'ai pas le temps de traverser tout le pays à vélo. De Kunming à Leshan je prends le train, de Leshan à Chengdu le bus, puis je reprends le vélo au nord de Chengdu.




La Chine est bien différente de l'image que j'en avais. Les habitants sont adorables et la nourriture délicieuse. Très généreux, les habitants ne cessent de m'inviter. Très soucieux de bien faire, ils font tout pour recevoir au mieux l’étranger que je suis. Les Chinois sont par ailleurs fascinés par l'Occident et ils passent leur temps à me photographier avec eux, comme si j'étais une star de cinéma ! Par les endroits peu touristiques que je traverse, je suis vraiment une curiosité, en permanence dévisagé. Outre le fait que je voyage à vélo, ce qui surprend le plus les gens est que je sois seul, un concept bien étrange pour eux. La Chine est à la fois le pays le plus moderne de mon voyage mais aussi le plus exotique car il n'y a presque aucun touriste occidental et de très rares autochtones anglophones. J'essaie donc de me mettre au Mandarin, mais ce n'est pas une langue facile. Cependant à l'aide de photos, de cartes, de dessins, j'arrive facilement à communiquer.

Tout le monde m'invite partout, même les policiers m'offrent le resto !
Et on me prend en photo 50 fois par jour comme si j'étais Brad Pitt !

Bien que je sois au centre de la Chine, je suis aux marches de l'Empire du Milieu et la culture locale est souvent plus ethnique que Han. Dans le Yunnan, près de la Réserve d’éléphants du Xishuangbanna, je traverse les plantations de thé, puis un peu plus loin les rizières en étage du peuple Hani. Aux alentours de Jianshui, ville historique confucéenne, je suis invité dans des maisons de thé. A Tonghai, le club cycliste m'offre un équipement contre le froid à venir. Chaque jour est riche en mille rencontres extraordinaires et je retrouve la magie du voyage à vélo. Puis Kunming et Chengdu me montrent le visage de la Chine contemporaine, en pleine construction, partout, et en grande effervescence consuméristes, avec toutes ses contradictions et ses problèmes de pollution.


Dans le Sichuan, je me plie aux visites touristiques incontournables du Grand Bouddha de Leshan, taillé dans une falaise de 70 mètres de haut et vieux de 1200 ans, et à l'escalade du Mont Emei Shan, l'un des quatre monts sacrés bouddhistes de Chine. Mais ces sites, très fréquentés, sont un peu surfaits. Aujourd'hui, la Chine reconstruit son passé détruit par la Révolution Culturelle et le résultat frise parfois le parc d'attraction. Alors je reprends vite mon vélo pour filer dans les montagnes. Après Songpan, je passe des cols de 4000 mètres d'altitude. 3400 kilomètres à vélo depuis Bangkok et 1000 mètres de dénivelé par jour, ce n'est pas facile pour les genoux et les nuits sont glaciales quand je dois dormir sous ma tente, mais les belles rencontres et les paysages enchanteurs valent bien tous les efforts. Dans les montagnes du nord-ouest, la population est tibétaine, d'origine, de culture, de religion et de langue. Les nomades des plateaux m'invitent systématiquement à prendre le thé sous leurs tentes et m’hébergent à l'occasion, m'invitant à monter leurs chevaux et m'apprenant à rassembler leurs troupeaux de yaks, leur principale source d'alimentation. Cette viande, qui ressemble au bœuf, est un régal. Par contre, le thé du matin, à base de beurre rance de yak est plus difficile à avaler ! (En fait j'ai rapidement appris à apprécier le stampa à partir du moment où on m'a montré comment le préparer en le malaxant en boule dans le creux de la main et non sous forme de grumeaux épars au fond d'un bol comme je l'ai ingurgité la première fois !)




Je suis maintenant aux portes d'un nouveau monde, au carrefour des chemins migratoires. Bientôt, je vais bifurquer vers l'ouest, par le Corridor du Hexi, qui marque le début de la route de la soie. Et je rencontre déjà parfois, au sein des communautés musulmanes Hui de la région, des traits de visages évoquant l'Asie Centrale. Jacky ( comme on m'appelle ici en me disant que c'est le plus beau nom qui soit en Chine ! )

Et un petit col de plus !

Chine : Qinghai, Langsu, Xinjiang... (lettre du 14 juin)
Mes possibilités de connexion étant très limitées en Chine (Google étant censuré et les cyber-cafés quasi inexistant tout le monde se connectant depuis son smart-phone), je réponds collectivement aux derniers messages que vous m'avez envoyé. Merci à chacun de vous pour qui j'ai une pensée personnelle. On a vraiment le temps de méditer quand on pédale 150 kilomètres par jour dans le désert !
Je suis aujourd'hui sur la Route de la Soie, dans l'oasis de Dunhuang, près des fabuleuses grottes bouddhistes de Mogao (ermitages monastiques datant du 7 au 12ème siècles), à la limite entre les déserts du Gobi et du Kalimatan, bordés au sud par le plateau himalayen : bref, une bien longue route à vélo depuis que j'ai quitté Chengdu, bien variée et bien physique aussi...

Les Tibétains me reçoivent sous leurs tentes,

Arrivé dans le sud du Gansu (dernières nouvelles sur mon blog), j'ai finalement décidé de bifurquer à l'ouest par le Qinghai pour rester un peu plus au Tibet et éviter la mégapole très polluée de Lanzhou. Ces deux semaines supplémentaires sur les hauts plateaux, avec des cols à 3800 et des cimes dans les 5000, ont été extraordinaires. J'ai été invité souvent chez des nomades et même dans des monastères tibétains. Just amazing !

Et les moines dans leurs monastères.

En redescendant dans la vallée du Fleuve Jaune, j'ai rencontré Pascal, un cycliste québécois qui rentre à vélo en Europe depuis l'Australie où il a passé 9 ans. Nous avons voyagé deux semaines ensemble, de Xining jusqu'ici, en passant par le Corridor du Hexi, en campant souvent en chemin.

Les sommets tibétains sont marqués par des drapeaux de prières

Ce soir je dois malheureusement prendre un bus pour aller directement jusqu'à Kashgar ( à plus de 2000 kilomètres et une quarantaine d'heures de voyage en bus avec un changement à Turpan !), car mon second visa se termine dans quelques jours et n'est plus renouvelable. De là, je passerai directement au Kirghizstan, ce qui est plus simple administrativement que de passer par Urumqi et le Kazakhstan. Pascal va continuer en vélo depuis Turpan, mais nous espérons nous recroiser au Kirghizstan, où je pense rester plus longtemps que lui, avant qu'il ne me double définitivement, car il compte arriver à Paris début décembre et moi seulement quatre mois plus tard.

Les photos suivantes sont de Pascal Lachance qui a un bien meilleur appareil que moi !

En montagne, soit ça monte...
soit ça redescend !

Mais après les dénivelés et le froid des montagnes, nous affrontons la platitude et la canicule du désert, quelque part entre le Gobi et le Taklamakan...




Avec seulement l'embarras du choix pour camper !




Voili-voilà, tout va bien dans cette Chine toujours aussi captivante, même si je pense avoir maigri (malgré les quatre plats de pâtes que je m'enfile tous les jours) et que j'ai un peu mal au genou... mais voyager à vélo est tellement extraordinaire à chaque instant, de part les rencontres fortuites et les paysages inespérés, que cela efface vite toutes les petites douleurs et autres inconforts du quotidien.

Au centre de l'Empire du Milieu et pourtant à ses portes, du haut du dernier tronçon occidental de la Grande Muraille, je dis au revoir à la Chine historique.