Description

Mais aussi avec bien d'autres moyens de transport parfois des plus surprenants... Le 1er juillet 2010, je pars de Bretagne à vélo. Arrivé au Maroc, je traverse l'océan Atlantique en voilier-stop. Je passe ensuite un an et demi en Amérique du sud. Puis d'avril 2012 à septembre 2013, je traverse l'océan Pacifique en voilier. Enfin, en mars 2014, je reprends le vélo pour rentrer en France depuis Bangkok, en suivant la route de la soie à travers la Chine et l'Asie Centrale...

mardi 21 avril 2015

Retour en Europe : de la Turquie aux Balkans...


Je n'ai pas trop le temps d'écrire ce blog en ce moment. Je compléterai donc ce récit et ajouterai des photos à mon retour. Cependant, pour ceux qui souhaitent suivre cette ultime trace européenne, voici un petit résumé de ces derniers mois de voyage :

Turquie (bis)
Le 17 janvier, je quitte Chypre en ferry et retourne en Turquie méridionale. Je suis les côtes méditerranéenne puis égéenne, en visitant scrupuleusement tous les sites antiques de Lycie, de Carie, de Ionie... sur cette route chargée d'une histoire plurimillénaire. J'essaye d'aller le plus lentement possible pour laisser passer le coeur de l'hiver. Le 25 février, j'arrive cependant à la Sublime Porte : Istanbul. Pour la première fois, après cinq ans d'absence, je fais tourner mes roues en Europe ! C'est vraiment le début de la fin de ce long voyage autour du monde. Enfin presque... Après 15500 kms à vélo depuis Bangkok (22500 kms depuis le début de mon voyage), il me reste tout de même à peu près 5000 kms à parcourir pour revenir à mon point de départ, à la Pointe du Raz en Bretagne, et  encore plein de nouvelles aventures à vivre (Bien qu'il n'y ai que 2700 kms à vol d'oiseau et 3700 kms par la route la plus directe, je compte bien encore faire quelques petits détours). Malgré tout je commence à estimer mon retour et, si je ne traine pas trop en chemin, je pense atteindre Paris vers la fin du mois de mai. Le 3 mars je reprends la route et pénètre dans les Balkans par la Thrace. Je fais un dernier stop ottoman à Edirne, pour laisser passer un ultime épisode neigeux (enfin j'espère) et prendre le temps de dire au revoir à la Turquie que j'ai adorée.




Bulgarie
Pour éviter l'autoroute, je rentre en Bulgarie en passant par l'extrémité nord-est de la Grèce, où je ne fais qu'un très bref séjour d'une quarantaine de kilomètres, parcourus en moins de deux heures. Puis, plus je remonte la vallée de la Maritza, plus le paysage se met à blanchir. Cette année l'hiver a été vigoureux et toute la région de Plovdiv est encore sous une trentaine de centimètres de neige. Pour un peu je me croirais en Sibérie ! Quand il y a du soleil, c'est très beau, mais j'ai hâte que le temps se réchauffe car, en roulant par 0 degré, je me gèle un peu... Au lieu de cela il se remet à neiger et je traverse les Monts Rodhopes avec plus d'un mètre de poudreuse au col. Heureusement j'ai une super option "crampons téléscopiques" sur mes chaussures de montagnes bas de gamme, made in China : un gadget de gosse, en l'occurrence bien utile, car cela me permet de freiner dans les descentes. C'est encore plus indispensable quand je suis retardé par une averse de neige, que la nuit me surprend et que je me prends dans la gueule tous les phares des chauffeurs de camion bourrés. Ce sont pourtant tous ces petits désagréments passagers qui pimentent mon existence de voyageur insatiable, faisant bouillir en moi le profond désir de vie, en expérimentant dans mon corps ce qu'on appelle l'espérance de la foi. En arrivant au Monastère de Rila, encore recouvert de son beau manteau blanc, j'ai vraiment l'impression de me trouver dans le décor du film Le Bal des Vampires. Je passe là une dernière nuit bulgare, hébergé par les moines orthodoxes.




Macédoine
Une semaine en Bulgarie, une autre en Macédoine... en quittant la Turquie si vaste, c'est drôle de se retrouver dans ces petits pays balkaniques, qui se traversent si rapidement, que j'ai tout juste le temps d'apprendre à dire : " bonjour, merci et au-revoir " dans la langue locale. Basique du voyageur qui me vaut d'être toujours accueilli par de larges sourires, d'autant plus appuyés quand je dis que je suis Français. Et oui, ici encore, on adooore la France. Quand on vit en métropole, on ne soupçonne pas à quel point on est aimé à l'étranger ! La Macédoine est un pays encore bien sauvage, qui brandit du drapeau européen à tous les coins de rues, comme un espoir pour conjurer le mauvais sort d'une économie toujours fragile. Le froid aussi me donne des ailes pour franchir, en chantant, les cols blancs de neige qui se succèdent. Le 21 mars, en ce premier jour du printemps, un beau soleil revient enfin, en même temps que j'arrive sur les bords du lac de Ohrid, frontalier avec l'Albanie.

Albanie
Deux jours d'une descente continue me mène à Durrës au bord de la mer Adriatique. Je gagne par la même occasion une vingtaine de degrés celcius, passant des montagnes enneigées, recouvertes de sapins, aux plages de sable, plantées de palmiers. Les Balkans sont vraiment le bouquet final de mon voyage. Je vais chaque jour de surprise en surprise, chaque vallée me révélant une identité nouvelle insoupçonnée. Dans cette mosaïque de peuples, les Albanais sont particulièrement chaleureux. Ils se targuent de descendre de l'antique civilisation des Illyriens et suivent un code de conduite ancestral appelé le Kanun. Par ailleurs la dictature communiste, qui a totalement coupée l'Albanie du reste du monde extérieur durant quarante cinq ans, a profondément marqué le pays. Arrivé à Shkodër, je rencontre quelques locaux ainsi que des voyageurs passionnés par ce pays. C'est une bonne raison de rester là huit jours, escaladant, avec mes nouveaux amis, le mont de 1500 mètres, qui domine la ville et le lac du même nom.

Monténégro
Le 1er avril, je reprends la route, entrant au Monténégro par la Côte d'Azur des Balkans : Ulcinje, Ile  de Sveti Stefan, Baie de Kotor... Pour la première fois de mon voyage, j'ai vraiment l'impression d’être revenu en Europe occidentale et les montagnes sauvages me manquent rapidement. Partant du niveau de la mer, je grimpe les 1700 mètres de dénivelés d'une petite route qui serpente, en vingt cinq lacets successifs, le long des flancs du Mont Crna Gora. C'est la montagne sacrée du Monténégro, qui a donné son nom au pays. La vue sur la baie de Kotor est vraiment splendide. Après Cetinje, je décide de continuer ma route en direction de la Serbie mais, arrivé aux pieds de la chaines du Durmitor, je suis bloqué par une tempête de neige tardive, avec des rafales de vent à plus de 100 km/h ! Je trouve refuge une nuit sous le haut-vent du monastere de Osrtog, puis une autre chez un ouvrier du batiment de Niksic. Mais, vu que le mauvais temps s'apprête à durer encore quelques jours, je finis par faire demi-tour afin de retourner sur la côte, dont les conditions atmosphériques sont plus clémentes. Je passe par Trebinje, une enclave serbe de Bosnie-Herzégovine, avant de rejoindre la très touristique Dubrovnik.

Croatie
Je longe la magnifique côte croate. Alternant îles et continent, je parcours la péninsule de Peljesac, puis l’île de Korcula, où est né Marco Polo. Depuis le Monténégro, je rencontre beaucoup de cyclo-voyageurs et je fais parfois quelques étapes avec certains d'entre eux. Le 11 avril je prends un ferry pour Split, où je profite enfin de températures véritablement printanières. Je continue par Sibenik. C'est certainement mon escale préférée de la côte, car cette bourgade est moins touristique et plus tranquille que les autres cités médiévales de la région. Après Zadar et l’île aux moutons de Pag, je quitte l’Adriatique et continue ma route vers le nord en direction de la Slovénie. Je compte revenir en France en suivant l’arc alpin. Une dizaine de cols de 1000 à 2500 mètres m'attendent sur ce parcours, qui passe par le sud de l’Autriche, puis le nord de l’Italie, avant de traverser la Suisse. Mais cet itinéraire devrait être vraiment plus beau que par la plaine. Cependant, dès ma première montée, je suis à nouveau bloqué par la neige. Heureusement, aux abords du Parc Naturel de Risnjak, un adorable couple de retraités m'accueille chaleureusement chez lui durant un jour et demi, le temps que l'orage passe.

Slovénie
Dimanche 19 avril, un beau soleil revient et je franchis un premier petit col alpin, marquant la frontière avec la Slovénie. Cette fois le printemps semble enfin être vraiment arrivé. Et, ici dans les montagnes, il explose. Les cimes sont encore sous la neige mais, dans des alpages verdoyants, c'est un vrai feu d'artifice floral de milliers d’espèces différentes. Dans chaque vallon, des habitants s'activent pour sortir de la période hivernale leurs petits chalets, regroupés autour du joli clocher du village. Je me sens au pays de Heidi ! La Slovenie a la particularité d'être située au carrefour des cultures latine, germanique et slave. La petite capitale, autant vénitienne que viénnoise, exprime toute la sophistication de la vieille Europe. Et le cout de la vie aussi y est bel et bien made in euro zone ! J'ai perdu l'habitude de payer en euro et j'hallucine sur les prix. Mais tout est beau, presque trop parfait, dans un style allant parfois jusqu'à afficher un certain négligé chic de bon ton. Lubjana est également une ville très écologique, plantée de grands arbres et maillée de pistes cyclables. Paradi du vélo : ici, la petite reine est devenu roi !

vendredi 16 janvier 2015

Petit tour de Chypre ou la recette du bonheur...

Revenu sur l'Ile de Chypre le 4 janvier, je commence cette nouvelle année en même temps que la dernière partie de mon voyage : le retour en France à vélo depuis Larnaca, une petite ville balnéaire située à l'extrémité sud-orientale de l'Union Européenne. Deux jours de tempête retardent mon départ. Et il s'ensuit une vague de froid venue de Sibérie, ce qui est apparemment totalement inhabituel ici. Je dors néanmoins sous ma tente, en camping sauvage sur la plage, les prix (en euros) des hébergements étant franchement prohibitifs en République de Chypre. Mais ces efforts sont bien vite récompensés par deux belles rencontres. Vous allez voir : le bonheur, on s'en raconte des tartines, mais en réalité, c'est pas bien compliqué.

 Cette plage serait le lieu de naissance d'Aphrodite...

A Limassol, je fais la connaissance de Richard, un Québécois, la cinquantaine, qui voyage à vélo (encore un ! ). Nous passons neuf jours ensemble. Depuis 31 ans, Richard part chaque année voyager six mois avec sa bicyclette. A ce jour, il a déjà fait plusieurs fois le tour du monde avec sa monture : 240 mille kilomètres au compteur et 128 pays tout autour du globe ! Quand il ne voyage pas, il est reboiseur au Canada. Son travail consiste à planter, à la main, entre 2000 et 2500 jeunes pousses d'arbres chaque jour ! D'un ton purement comptable, il me dit : " Depuis que j'ai commencé ma job, j'ai planté environ 2 millions 600 mille arbres. Mais tu sais, ça n'a rien de poétique, c'est un travail harassant. On replante des arbres uniquement parce que l'industrie du bois a besoin d'en couper. " Mais moi, je ne peux m’empêcher de penser : " Ouah ! Difficile de faire plus équitable ! S'il n'y avait que des gens comme lui sur la terre... pour sûr, y'aurait pas de réchauffement climatique, ni de guerres ! " Richard n'a jamais eu de maison, ni de voiture, ni d'ordinateur, ni de téléphone. Quand il travail, il partage un dortoir dans une hutte forestière. Le reste du temps, il vit sous sa tente. Pourtant, chaque matin je l'entends sortir de son sac de couchage avec la même bonne humeur : " Je suis bien le plus heureux des hommes ! " dit-il en s'étirant. En voyage, il mange tous les jours un bol d'avoine le matin, quelques fruits en journée et le soir un plat de pâtes avec un oignon ou de l'ail, parfois accompagné d'une boite de sardine. Et chaque soir il se régale avec le même plaisir : " Mais que c'est bon ! Tu sais je pourrais m'offrir bien d'autres choses. Je n'ai rien à moi, pas d'argent en banque, mais je suis riche car je n'arrive pas à dépenser tout ce que je gagne les six autres mois de l'année ! Je n'en ai pas le goût, c'est tout, cela me suffit. Pour moi le bonheur c'est de vivre comme ça, en découvrant le monde, en vivant simplement et en étant totalement libre " Et oui bien sûr : la sacro-sainte Liberté... Comme on dit : ça n'a pas de prix !


Alors que Richard et moi arrivons à Phagos, il se remet à pleuvoir. Nous répondons alors à notre première petite annonce sur le site web warmshowers, ou des particuliers proposent d'héberger gratuitement des cyclo-voyageurs de passage. C'est la première fois que nous utilisons ce réseau social car ni Richard ni moi n'avons de téléphone ni d'ordinateur portable, ce qui complique les choses pour se connecter à internet. Bref, ce soir là, depuis un internet-café, nous rentrons en contact avec Lucas, qui nous accueille illico chez lui. Lucas est un voyageur Italien, la trentaine, qui dispose d'un studio pendant un mois à Paphos. Il voyage également à vélo à ses heures et c'est surtout la personne la plus décroissante que j'ai rencontré de tout mon voyage. Sa solution : essayer de vivre gratuitement et aider les autres à suivre le même chemin que lui. D'emblée, il nous dit : " Je viens de passer un an en Finlande, l'un des pays les plus chers sur terre, et je n'ai dépensé que 400 euros en 12 mois, essentiellement pour payer mes sorties en discothèque, parce que c'est la seule chose que j'avais du mal à trouver gratuitement. " Tous les objets qu'il possède tiennent dans un petit sac à dos de 10 litres, grosso modo : une tenue de rechange et un smartphone, qui lui permet de mettre la technologie au service de la décroissance. Il nous explique : " Avec les sites web, c'est très facile. Pour dormir, j'utilise couch-surfing, warmshowers, be-welcome ou je fais du woofing. Pour manger je fais du dumpster diving (les poubelles des supermarchés) ou je vais sur fruit-falling pour les végétaux frais tombés des arbres. Et quand j'ai besoin d'un objet, il suffit d'aller sur trashwiki.org, qui regroupe ce dont les gens se débarrassent. En ligne, tu peux même trouver les maps pour localiser les meilleurs plans près de là où tu te trouves " Lucas est également vegan, ce qui contribue également à la frugalité de son existence et il fait du yoga tous les matins, ne fume pas et ne boit pas, ce qui lui permet de rester gratuitement en bonne santé. Il a aussi vécu en dormant à la belle étoile au milieu de la forêt, en mangeant des baies sauvages. En fait, l'équation est simple : moins on consomme, moins les industries ont besoin de produire, moins on pollue, et parallèlement plus on est libre, plus on a le temps de vivre, plus on existe. Et cela va aussi avec : plus on partage. Et oui, l'amour, la Fraternité, c'est bien la chose qui constitue notre plus grand besoin, plus que de n'importe quoi d'autre en fait, mais ça ne se trouve pas dans les rayons des supermarchés.


Nous voilà donc au nombre de trois, Richard, Lucas et moi, une sainte trinité, bien branchée sur la même longueur d'ondes, pour faire le tour de la péninsule d'Akamas à vélo, ultime partie sauvage sur la côte de la République de Chypre. Oui, le reste des rivages de l’île a été vendu au diable argent, avec son âme grecque au passage, pour construire des résidences secondaires ennuyeuses aux retraités de la middle class anglaise. Ces derniers tournent désormais en rond autour de l’île dans leurs 4x4 rutilants, en attendant de passer au fauteuil 2x2, qui leur donnera peut-être enfin l’opportunité d'échanger avec les deux roues que nous sommes. Car pour être à même d'échanger, il faut bien un minimum d'Egalité... ce que nous trouvons dans la partie turque de Chypre, au nord de l’île, un peu plus pauvre et bien plus chaleureuse.

Le bonheur ne se trouve ni dans le confort, ni dans la sécurité.

Ah oui, j'oubliais : La recette du BONHEUR !... Où j'en étais ? Liberté, Egalité, Fraternité, mais c'est bien sûr ! Ça me disait bien quelque chose... Mais ça, ce ne sont que des mots, paroles-parooles-paroooles comme le chantait Dalida. En fait le Bonheur, c'est très très simple. Simple comme la vie. Car il suffit de les vivre au quotidien ces jolis mots de liberté, d'égalité et de fraternité ! Et ça, c'est à la portée de tout le monde dans sa vie personnelle de tous les jours. Il faut juste penser un peu par soi-même, ne pas avoir peur de se poser de vraies questions et ensuite d'écouter les réponses qui viendront de la voix de son cœur, plutôt que d'essayer de se conformer aux discours formatés qu'on nous balance à longueur de journée. Il faut aussi etre prêt à renoncer à deux ou trois petites choses matérielles, sans doute confortables mais pas vraiment essentielles finalement. Alors, quand on arrive à vivre selon ses propres principes, en n'étant plus écartelé entre ce que l'on souhaiterai faire et ce que l'on fait en réalité, on devient parfaitement heureux. Quelques exemples concrets pour t'aider à comprendre le processus. Si tu ne veux plus voir de S.D.F. mourir de froid en France au XXIème siècle durant l'hiver, invites-en un chez toi ! Si tu es contre les centrales nucléaires, coupe toi d'E.D.F. et vis avec la petite quantité d'énergie produite par un panneau solaire que tu peux accrocher à ton balcon ! Si tu es contre la société de consommation, cesse d'acheter des choses dont tu n'as aucun besoin, en prenant le temps d'examiner quelles sont tes nécessités vitales ! Tu vois ce n'est vraiment pas compliqué. Comme pour tout dans la vie, le plus difficile est de vaincre la peur de faire le premier pas. Si le monde ne te plait pas comme il est, change le ! Et pour cela, commence par toi-même. D'abord c'est la seule chose sur laquelle tu puisses avoir une action. De plus, quoi que tu fasses, tu changeras le monde bien plus encore que tu ne le penses, car tu n'es que la représentation d'un pourcentage de l'humanité tout entière, ce qui commence à faire du monde. Enfin tu es un modèle pour les autres, ce qui es beaucoup plus contagieux que tu ne le crois. C'est pourquoi les choses peuvent changer très vite par ta seule action. Voilà plus de quatre ans que je voyage en essayant de vivre le plus possible en accord avec moi-même et c'est pour cela que depuis mon départ ma vie n'est que bonheur. Mais ce qu'il y a de vraiment réjouissant, c'est que je ne suis pas le seul dans ce cas. En fait, je suis même chaque jour surpris par le nombre croissant de gens que je rencontre qui prennent ce chemin : de liberté, d'égalité et de fraternité, vécus dans le quotidien de leur vie. C'est comme si nous assistions à une révolution universelle : une multitude d'évolutions individuelles qui transforment peu à peu l'humanité dans son ensemble, silencieusement, car les journalistes n'en parlent pas. Mais peut être que, pour s'en rendre compte, il faut éteindre sa télé, son ordi et son téléphone, cesser de voir le monde au travers de la loupe grossissante des médias, qui focalisent leur attention sur des détails à sensations fortes, déformant le portrait du monde dans sa globalité. Pour sortir de la caverne platonicienne, il faut parfois prendre son courage à deux mains et partir aller voir la nature des choses par soi-même, en parcourant les chemins. On y découvre une toute autre réalité et, avant tout, que le bonheur est à la portée de la main. ;-)

jeudi 1 janvier 2015

Fin d'année en Terre Sainte

Après avoir traversé la Turquie du nord au sud à vélo, passant des côtes de la Mer Noire à celles de la Méditerranée, je rejoins l'île de Chypre en ferry. N'étant plus qu'à 350 kilomètres d'Israël, je me dis que c'est une occasion inespérée d'aller passer les fêtes de fin d'année en Terre Sainte. C'est ainsi que le 22 décembre, je prends un avion pour Tel Aviv, abandonnant deux semaines mon vélo à Chypre. Pour la nuit de Noël me voilà rendu à Bethléem en Palestine, pour assister à la messe de l'église de la Nativité. Je passe ensuite quatre jours bien mystiques dans la sainte ville de Jérusalem. Puis, après un arrêt, sur les rives de la Mer Morte et un autre au bord de la Mer Rouge, je vais passer le nouvel an en Jordanie, dans le site légendaire de Petra, d'où je vous souhaite à tous une excellente année 2015 !

mardi 16 décembre 2014

Traversée de l'Anatolie

Côte de la Mer Noire.
Le point noir au centre de l'image étant un dauphin à une vingtaine de mètres du rivage...
Oui, c'est un peu le défaut de mon appareil photo compact à deux balles !

Depuis Batumi, je longe la côte de la Mer Noire : une grande route toute neuve, plate, avec de larges bas cotés et peu de circulation. Il fait beau, une vingtaine de degrés et il n'y a pas de vent. Après les montagnes du Caucase, voir un paysage de plages de galets, plongeant dans des eaux translucides, où s'ébattent des dauphins, c'est reposant. En trois jours de vélo, j'arrive à Trabzon. Dernière capitale de l'Empire Byzantin, c'est aujourd'hui une petite ville provinciale très animée, où la nourriture y est particulièrement délicieuse et les filles très jolies. C'est l'endroit idéal pour me reposer deux jours et enfin prendre le temps d'actualiser ce blog. Car continuant à voyager sans aucun instrument électronique (ni ordinateur portable, ni téléphone mobile et encore moins de GPS), je n'ai pas vraiment le temps de m'occuper de cela au quotidien.

Petite ville ottomane de Amasya,
construite sous les tombeaux perses des Rois du Pont, creusés dans la falaise
Paysage agricole classique des hauts plateaux ondulés d'Anatolie centrale,
royaume des kangals !
Sphinx gardant l'une des portes de la capitale Hittite de Hattusa (vers 1300 ans avant J-C)

Après Trabzon, la route côtière devient de plus en plus monotone, la circulation s'intensifie et le temps se refroidit  franchement avant de tourner à la pluie. Après quatre jours à constater que mes contre-façons chinoises de vêtements de sport ne sont pas vraiment waterproof, j'arrive à Samsun, trempé comme une soupe. Il est grand temps que je trouve un climat plus clément pour passer l'hiver ! Je décide de mettre le cap plein sud pour rejoindre la côte méditerranéenne de Turquie. Cette traversée de l'Anatolie, du nord au sud, me permet par ailleurs de passer par certains sites historiques que je rêve de visiter.

La Cappadoce
Ci-dessus et ci-dessous : Cornélia et moi


Avec plus de 13 000 kilomètres à vélo depuis Bangkok (et plus de 20 000 depuis mon départ de France), les détours de plusieurs centaines de kilomètres et quelques montagnes en plus ne me font plus peur. Au contraire, je dirais même que le vélo me manque rapidement quand je m’arrête plus de deux jours quelque part et les dénivelés aussi car le terrain plat me semble rapidement monotone. Oui, le vélo, c'est très addictif. Rapidement, ça vous gagne ! Durant deux semaines, je roule très souvent sous la pluie et même parfois sous un peu neige. Qu'importe, je m'habitue, et du moment que je n'ai pas trop froid, ce n'est pas si désagréable que ça. Cela devient pénible quand les températures tombent en dessous des 5 degrés mais, en pédalant vite, on se réchauffe.






Le grand avantage de passer cette saison en Turquie est que je suis absolument seul pour voir tous les sites touristiques, habituellement noirs de monde le reste de l'année. J'ai pour moi : les tombeaux perses de Amasya, la capitale hittite de Hattusa, les lieux de cultes et citées souterraines byzantines de Cappadoce...



Un vrai gruyère...
avec des cités souterraines construites à des dizaines de mètres sous terre
et pouvant accueillir des milliers de personnes.

Quoiqu'en Cappadoce, les sites " incontournables " sont tout de même envahis par les bus de touristes quotidiens des voyages organisés (surtout des Chinois et des retraités Allemands), alors que c'est la période qui est la plus creuse de l'année... je n'ose imaginer en juillet et en août ! Mais dès qu'on sort un tout petit peu des sentiers battus, la Cappadoce est toujours une région superbe et relativement sauvage. Des bergers m'ont même invité à dormir chez eux dans leur habitation creusée dans la montagne. Ce fut une expérience trop glodite !

Par endroit la Cappadoce est devenu un grand supermarché du tourisme de masse
Et, à certains carrefours, c'est pas toujours évident de trouver son chemin...
 Car question "hotels de charme" , version troglodyte, il n'y a que l'embarras du choix !
 Mais on est quand même vraiment mieux chez l'habitant...
ou, à défaut, dans quelques pensions locales bon marché.

Le plus difficile, lors de cette traversée du nord au sud de la Turquie, est de gérer les kangals, ces énormes chiens de bergers, certains gros comme de vrais petits veaux (regardez par vous même les images sur le net), parfois rendus à l'état sauvage et qui errent sur les plateaux anatoliens, en meute, tels des loups affamés à la recherche de nourriture. Et s'il y a une chose au monde qu'ils détestent, ce sont : les vélos ! Les roulements à bille des roues doivent provoquer des ultra-sons qui excitent les chiens au plus haut point. Je me suis donc fait attaquer plusieurs fois, mais heureusement je suis toujours arrivé à m'en sortir sans morsure et à négocier mon passage avec le chef de la bande.


Une image trouvée sur internet car je n'ai pas vraiment eu le courage d'en faire moi-même.
Les Turcs ne sont pas nains mais certains kangals sont effectivement très grands !

Tous les cyclistes  ont leur technique pour parer aux chiens. La mienne est de leur parler sur un ton jovial en disant : " Mais c'est qui ce beau chien, oh le gentil toutou, etc... " Et ça marche, ça les calme. Ou parfois je chante, ça marche aussi. Mais c'est pas toujours évident de chanter juste dans ces conditions et ces bêtes féroces sont très exigeants. Si vous ne me croyez pas, essayez. Entraînez-vous d'abord sur des yorkshires avant de plus gros calibre et vous verrez ! Une fois il y en avait deux en train de dévorer un énorme sanglier, et ils m'ont pris pour un indésirable pique-assiette, c'était un peu flippant, alors je leur ai dit : " Non, les gars, ne vous dérangez pas pour moi, surtout continuez à manger, je ne fais que passer... " Souvent les paysans abattent des sangliers car ces derniers détruisent leurs cultures et, comme ils ne mangent pas de cochon, ils laissent le cadavre pour nourrir cette race de chiens errants dont ils sont très fiers. Il faut avouer que ce sont de belles bêtes, bien puissantes et résistantes à toutes les conditions climatiques. En fait, ce ne sont pas des monstres, mais seulement de gros nounours qu'il faut savoir caresser dans le sens du poil.

 Dernières montagnes : traversée de la chaîne de l'Ala Daglar, dominée par le Mont Demirkazik (3756 m)
et arrivée au sommet du dernier col (1600 m) qui me sépare encore de la mer Méditerranée.

Malgré la froideur de l'hiver et la sauvagerie des chiens, après tous les pays que j'ai traversé, tout me semble facile en Turquie. La culture est sophistiquée, la nourriture excellente et les gens sont d'une grande douceur. Je me sens déja presque de retour à la maison. Cependant il y a peu d'anglophones et même je rencontre plus de germanophones et c'est une bonne occasion pour moi de me remettre à l'Allemand !



Chateau de Kizkalesi sur la côte méditerranéenne
 Non loin de la côte, la Grotte du Paradis,
dont on raconte que sa rivière souterraine se jette dans l'infernal Styx.

Enfin, quinze jours après avoir quitté la Mer Noire, j'arrive au bord de la Mer Méditerranée au niveau de Mersin. Là, je retrouve le beau temps : ciel bleu, grand soleil et une vingtaine de degrés en milieu de journée, avec une eau presque baignable, même si je ne me suis pas encore motivé pour m'y plonger. Pour essayer de fuir l'hiver, je vais continuer ma route toujours plus au sud en prenant un ferry à destination de l’Île de Chypre.


Fresque byzantine d'une des innombrables églises troglodytes de Cappadoce

dimanche 16 novembre 2014

Pays du Caucase : Arménie et Géorgie


Je reprends ma route en solitaire avec mon nouvel équipement me permettant d'affronter le froid

La frontière irano-arménienne est marquée par la rivière Araxe, supposée être le Guihôn de la Bible. Une fois sur la rive nord, l'escalade commence. La traversée du massif de Zanguezour, qui aboutit à l’extrémité occidentale du Plateau du Karabagh, est l'une des parties les plus difficiles de mon voyage, surtout en cette saison d'automne avancé. Les frontières n'ont aucune logique géographique et la seule route, menant de l'Iran à la capitale arménienne, se faufile entre deux enclaves azerbaïdjanaises, en affrontant les montagnes à la perpendiculaire. Le résultat est une enfilade de cols, l'un culminant à 2535 mètres, intercalés de profondes gorges redescendant aux alentours des 600 mètres d'altitude. Bref, ça ne fait que monter ou descendre, avec des pourcentages de pente dépassant souvent les 10/100.

Ma première montagne en Arménie : le col de Meghri

Mais le plus difficile est le froid de cette fin du mois d'octobre. Je me paie d'abord de rouler dans le nuage, puis sous la pluie, la grêle et enfin la neige ! Après quelques nuitées frigorifiques sous ma tente, je commence à envisager de dormir dans des auberges, quand j'arrive à en trouver en chemin. Cela dit, les routes sont quasiment désertes, ce qui fait du bien après l'Iran, et les paysages sont grandioses. Je visite aussi quelques monastères de ce pays, le premier au monde a avoir été christianisé, comme celui de Noravank perdu de façon émouvante au fond d'une petite vallée encaissée.

Monastere de Noravank...
et la gorge qui y mène.

Enfin redescendant dans la vallée de l'Araxe, je débouche devant un panorama incroyable : face à moi les neiges éternelles du Mont Ararat (où s'est échoué l'Arche de Noé), dominant la plaine de Erevan, absolument grandiose. Le 4 novembre, j'arrive enfin dans l’agréable capitale arménienne, où je me repose deux jours, avant de reprendre la route en direction de la Géorgie. Malheureusement, je n'ai pas trop le temps de chômer, si je ne veux pas être pris dans les glaces du Petit Caucase, que je dois encore traverser, avant pouvoir atteindre la Mer Noire à Batumi.

Mont Ararat
Col Ararat.

Je repars d'Erevan par un bel anticyclone qui dure jusqu’à ce que j'atteigne la Mer Noire. Heureusement, car malgré un beau soleil et une dizaine de degrés durant la journée, les nuits dans le Petit Caucase sont glaciales en cette saison, voisinant les -15 degrés. La plupart du temps, j'arrive à trouver des hébergements sur la route, sommaires et assez chers pour leurs qualités, mais je dors aussi parfois sous ma tente et ce n'est pas vraiment le fun de se lever les pieds dans la neige. Cela dit, pour rouler, les conditions sont idéales et je rejoins sans trop de peine la Géorgie.

Hauts plateaux de la Meskhétie

De l'autre coté de la frontière, le paysage des Gorges de la Koura, avec ses monastères déjà couverts d'un fin manteau blanc, est encore plus beau. Depuis Akhalkalaki, je prends quelques jolies pistes traversant le haut plateau de la Djavakhétie pour rejoindre la Cité Troglodyte de Vardzia par le versant sud-est qui la domine. Mais je ne veux pas trop m'attarder en chemin de peur que le temps ne se gâte et je décide de foncer tout droit sur Batumi, en franchissant un dernier col, le Goderdzi, qui me sépare encore de la Mer Noire.

Racourcis à la Jaco...

Mauvais choix ! Il est fermé depuis deux semaines et pour tout l'hiver, déjà enseveli sous plus d'un mètre de neige. Je dois faire demi-tour, puis un détour de 300 kilomètres, pour contourner la chaîne de Meskhétie par le nord. Cela me prend quatre jours supplémentaires mais me permet de passer par les jolies Gorges de Borjomi, puis par la vallée de l'Imérétie. C'est la paradisiaque Colchide, d'où Jason et ses Argonautes ont rapporté la fameuse Toison d'Or. Je suis ici en plein syncrétisme héllénico-biblique ! La route est belle mais la circulation devient infernale des qu'on rejoint l'axe Tiblissi-Batumi. La route est toujours aussi petite et les Georgiens roulent comme des fous. Plusieurs fois, je me fais raser de pres par des bus et des poids lourds. Enfin, le 15 novembre, j'arrive sur les bords de la Mer Noire, où je retrouve la douceur moite du climat d'Adjarie, ainsi que les joies du camping sauvage.

 Du haut des gorges de la cité troglodyte de Vardzia.
Sur le sentier gelé il faut mieux éviter la glissade fatale...

Au moment de partir de Batumi, je rencontre quelques voyageurs sympas : un cycliste français, un motocycliste hongrois et un auto-stoppeur tchèque. Je décide donc de rester une journée de plus mais je reprends la route demain pour aller dormir en Turquie.

Et enfın Kara Deniz : la Mer Noire
TO GO IN NOVEMBER TO HAVE WARM WEATHER
THAT'S THE QUESTION OF THE CYCLIST !!!